Journée mondiale de l’OMS

samedi 8 avril 2006.par Gilles Pradeau
 
Vendredi 7 avril était l’occasion pour l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de publier son rapport annuel "Travailler ensemble pour la santé" ; cette année, cette journée était donc dédiée aux professionnels de la santé et au grave problème de la fuite des "cerveaux".

La loi française, dite CESEDA [1], a été de suite estampillée comme "néo-coloniale" (grâce au titre de séjour "Compétences et talents" qui facilite le séjour des qualifiés au détriment des autres), mais il convient de souligner la portée mondiale de la fuite des cerveaux qui touche durement les pays du Sud.

A ce sujet, le rapport de l’OMS paru vendredi 7 avril 2006 intitulé "Travailler ensemble pour la santé" dresse un constat pour le moins alarmiste : après des décennies d’investissements insuffisants dans le secteur de la santé, les conditions de travail sont devenues inacceptables pour ces professionnels qui préfèrent fuir vers les pays plus riches. Cela donne d’ailleurs un jeu plutôt curieux de migrations reposant sur des logiques à la fois de proximité géographique et linguistique : ainsi l’Afrique du Sud attire les médecins ou les infirmières venant des pays voisins, tandis qu’elle voit ses propres personnels partir pour un pays lui aussi anglophone, généralement l’Australie ; quant aux médecins australiens, eux préfèrent aller aux Etats-Unis.

Ce jeu des chaises musicales peut pourtant se chiffrer de manière tout à fait catastrophique. Plus de 10 millions de personnes meurent chaque année dans le monde de maladies que l’on sait guérir pourtant facilement, en raison du manque de personnels globalement : selon ce rapport annuel, il en manque près de 4,3 millions dans le monde.

« Alors que la population mondiale augmente, le nombre de soignants reste stationnaire ou diminue là où l’on a le plus besoin d’eux », affirme le directeur général de l’OMS. « Dans l’ensemble du monde en développement, les agents de santé sont confrontés à des difficultés économiques, à la détérioration de l’infrastructure sanitaire et à des troubles sociaux. Dans beaucoup de pays, ils sont aussi victimes de l’épidémie de VIH/SIDA. » Au moins 1,3 milliard de personnes dans le monde n’ont pas accès aux soins les plus élémentaires, le plus souvent à cause de cette pénurie. L’Afrique subsaharienne reste la zone la plus gravement touchée, comptant 11 % de la population mondiale et 24 % des malades de la planète, mais seulement 3 % du personnel de santé mondial.

C’est cette pénurie, conjuguée au manque de connaissances théoriques et pratiques, qui va aussi empêcher les systèmes de santé de combattre efficacement les maladies chroniques. Voici donc pointée aujourd’hui une autre raison à l’échec relatif de la campagne sur les objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Cette campagne, à la fois ambitieuse et modeste (ambitieuse d’un point de vue pragmatique, modeste d’un point de vue idéal), fixait des points concernant la santé, à savoir :

- réduire le nombre de femmes qui meurent en donnant naissance
- permettre à davantage d’enfants de survivre durant les deux premières années de la vie
- essayer d’empêcher la catastrophe du VIH/SIDA
- s’assurer que les gens ont accès aux médicaments indispensables
- améliorer la santé sous toutes ses formes et contribuer ce faisant à réduire la pauvreté

Le rapport recense cinq tâches difficiles dont on doit s’acquitter si l’on veut atteindre les objectifs :

- renforcer les systèmes de santé
- veiller à ce que l’on accorde à la santé un degré de priorité élevé dans les politiques économiques et de développement général
- élaborer des stratégies de santé qui répondent aux besoins divers et changeants des pays
- mobiliser davantage de ressources pour la santé dans les pays pauvres
- améliorer la quantité et la qualité des données sanitaires pour éclairer la prise de décision et favoriser la transparence aux niveaux international et national (notons que l’INED, organisme français, participe à cette tâche)

Enfin, à l’occasion de cette journée mondiale, outre ce rapport, on a aussi pu entendre Okechukwu Ibeanu, le rapporteur spécial des Nations Unies sur les déchets toxiques. Ce dernier rappelle dans un communiqué de l’OMS que « le grand nombre de personnes dont les droits à vivre, à la santé et à la nourriture sont affectés par les produits chimiques en fait un des enjeux majeurs en matière de droits de l’homme. »

Les produits toxiques constituent de sérieuses menaces pour ces droits de la personne, surtout lorsque l’OMS estime que ces produits causent la mort de 47000 personnes chaque année. Ces droits incluent le droit à la vie, à la santé, au droit d’accéder à l’information et à la possibilité de décider en toute connaissance de cause de consommer des produits et des aliments sains. Alors, évidemment, les logiques de santé et de bien-être doivent devenir prioritaires au niveau mondial comme au niveau européen (n’oublions pas Reach...), ce qui est l’un des axes de travail essentiels des Verts.

[1] Le projet de loi CESEDA est en route. Ses opposants lui reprochent d’organiser l’immigration jetable et de fouler aux pieds des principes humanitaires de base.

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