Verts : les 5 candidats à Rennes

jeudi 23 mars 2006.par Correspondant
 
Le meeting des candidats à la candidature tenait plus de "L’école des Fans" que du débat.

Hier soir à Rennes, les Verts ont joué à "pouf pouf, ce sera toi". Les cinq candidats verts à la candidature pour l’élection présidentielle étaient réunis sur la scène de la salle de la Cité avec l’objectif partagé de convaincre le militant de base de voter pour lui avant le 14 avril, date de clôture du scrutin interne par correspondance.

En partant de droite à gauche, on retrouvait donc Alain Uguen, Dominique Voynet, Jean Desessard, Cécile Duflot, Yves Cochet et au centre, Mireille Ferri, l’animatrice auto-confinée dans un rôle d’horloge parlante. Car de débat(s), il n’y a point eu. Dans une ambiance « école des fans » orchestrée au féminin, avec dans le public caméscopes et appareils photo numériques de sortie pour immortaliser la présence de son poulain dans cette course au « grand prix présidentiel », chacun y est allé de son couplet sur le CPE et la jeunesse de ce pays (actualité oblige), sur la présidentielle, élection honnie par Les Verts mais à laquelle ils ne peuvent échapper ("ils sont les mieux placés pour porter l’écologie politique ; il ne faut pas laisser la place à Corinne Lepage..."), sur le programme des Verts qu’ils porteront à coup sûr (le parti n’est pas simplement une écurie pour candidat médiatisé...)... Bref, chaque candidat a pris cette campagne par les cornes excepté Alain Uguen dont le discours contre-pied en faveur de primaires à gauche n’a pourtant surpris personne. Il faut bien reconnaître que sa proposition a connu un plus grand succès au bar, à l’heure de la trinquette. Pendant que Yves Cochet s’aperçevait, de retour des toilettes, qu’on venait de lui poser un lapin, que la garde rapprochée de Dominique Voynet essayait d’ouvrir la voie du buffet à Madame La Ministre sous les regards admiratifs de ceux qui ont trouvé leur maître, certains militants avouaient en catimini espérer des primaires à gauche, "seule" option stratégique capable de contrecarrer le rêve élyséen d’un Sarkozy. Ces mêmes militants n’écartaient pas la possibilité de voter PS dès le premier tour s’il le fallait. L’utile n’est pas forcément agréable à entendre.

Mais revenons à nos moutons : quel pilote pour « l’attelage vert » ? Yann Wehrling l’a dit en introduction : "Il faut un candidat écologiste à l’élection présidentielle et les Verts sont les plus légitimes !" La soirée était lancée, pas le débat. Pourquoi ? D’abord pour une question de forme. Un quart d’heure de présentation par candidat, suivi de trois séries de questions écrites et de trois minutes de conclusion. Le petit train des discours était sur les rails. L’absence d’une véritable animation en rajoutait au manque de souffle de la soirée. Yves Cochet a bien cherché à engager un débat avec ses "amis", posant d’abord une question à Cécile Duflot sur sa position si José Bové venait à être candidat, puis titillant notamment Jean Desessard sur son appartenance à la LCR du temps où elle était encore pro-nucléaire. Alain Uguen aurait pu jouer l’aiguillon de la soirée mais encore aurait-il fallu qu’il ait le sens de l’orientation. Au lieu de quoi, il s’est enlisé dans une défense poussive des primaires à gauche. Après avoir remercié ses 108 signataires qui "avec lui font du sang neuf", il a égrainé les nombreux acronymes dont il s’est fait avec le temps le spécialiste : "ACTES", "ALLIAGE"... On en passe et des pas bons ! Bref si un correcteur avait du sanctionner la copie de l’élève candidat à la non-candidature, il aurait pu écrire ceci : "Malgré de bonnes idées, vous n’avez pu éviter le piège du hors sujet alors que vous auriez pu interroger les quatre autres prétendants à l’investiture sur leur stratégie quant aux élections à venir, présidentielle et législatives, les obligeant à s’expliquer sur la façon dont les Verts et leur programme pourront se faire entendre au cours des campagnes électorales et après".

Chaque candidat s’en est donc tenu à présenter ce qui faisait la spécificité de sa candidature. Jean Desessard a lancé un appel à la construction de "l’écologie sociale". Une construction aux contours imprécis dont les fondements reposent sur l’impérieuse nécessité d’opérer "la liaison avec les couches populaires". Une cuisine à laquelle les militants, se grattant la crinière pour essayer d’y voir plus clair, ont au final peu goûté. Au petit jeu des prises de parole, un trio de tête s’est très vite détaché. Dominique Voynet d’abord. Figure historique des Verts, elle a pris sur elle pour la jouer humble, ce qui n’a pas trompé son monde. Elle a défendu la nécessaire présence de Verts "lucides et radicaux" à la Présidentielle, "pour que les Verts pèsent de tout leur poids" en appelant de ses voeux une "écologie, populaire, fraternelle, partagée". Cécile Duflot, la benjamine de la classe, a passé les habits de "la passionaria écologiste", convaincue que sa présence à Rennes en cette soirée de printemps était la meilleure façon de démontrer à ceux qui en douteraient que les Verts sont les seuls en mesure de pratiquer la politique autrement. Les pieds posés sur une valise pour être à hauteur de micros, elle s’est montrée offensive, désireuse de voir l’écologie politique "passer un cap, [...] pour changer radicalement". Le tout dit d’une voix encore chevrotante. Elle a prôné une approche planétaire des questions telles que la régularisation des sans-papier ou la gestion publique de l’eau. Quant à Yves Cochet, toujours considéré comme le local de l’étape, sobre dans son costard, il a souhaité prioriser le programme des Verts, où les bonnes idées sont légions mais toutes mises au même niveau. Relocalisation de l’économie, mise en place d’un revenu d’existence et fédéralisme sont les ingrédients d’une campagne qu’il imagine "thermodynamique". A chacun sa recette mais quoi qu’il en soit, il est bien difficile, après cet exercice de style, de distinguer celui qui incarnera le mieux le message des Verts à l’élection présidentielle. Il faudra pourtant faire un choix.

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